Chroniques Concerts

Damon & Naomi - Paris Librairie En-Marge 17 janvier 2007

Posté par : Emmanuel Durocher le 29/01/2007

Une sympathique session dans une petite librairie du onzième arrondissement, Naomi Yang et Damon Krukowski ont joué une demi douzaine de chansons intimistes et cultivées avec bonne humeur et une bonne dose d’humour ; malgré la pluie, l’ambiance était aux vacances puisque le couple d’Américains parcourt l’Europe et en profite pour placer de petits concerts un peu partout.

C’est plutôt navrant de voir à quel point Damon & Naomi sont sous-estimés, depuis près de vingt ans, ils composent une musique assez magique à commencer par la pop minimaliste et lunaire du trio Galaxie 500 (les disques "On fire" et "This is our music", éblouissants mais malheureusement un peu oubliés) puis en duo sous le nom de Pierre Etoile (à traduire en anglais pour comprendre pourquoi ce nom est superbe) et enfin avec leurs patronymes. Pour se faire une idée et pourquoi pas rêver un peu, un tour sur : leur page myspace et leur site internet



La Maison Tellier en interview

Posté par : Chtif le 10/01/2007

Pour débuter l'année, quoi de mieux qu'un entretien avec La Maison Tellier, l'une des meilleures surprises de l'année ? Raoul Tellier, fondateur du groupe avec Helmut, s'est plié avec grande gentillesse au jeu des questions-réponses, histoire de faire le point quelques mois après la sortie du premier album.

3,2,1, moteur...

Sefronia - Revenons sur les débuts : votre premier Ep (2004) est un tremplin et pose clairement les bases. La moitié des morceaux sera d’ailleurs conservée pour le premier album qui suivra (dommage pour "Willard and the crushing dam", passé à la trappe, d’ailleurs). Entre les deux, que s’est-il passé ?

Raoul Tellier - On a écrit plein de chansons et signé chez notre label actuel, Euro-Visions. En fait, notre premier Ep a été enregistré dans leur studio, et de fil en aiguille (en gros un an après...), ils en sont venus à nous proposer une signature chez eux. On a démarché personne, au moment où l'on commençait à y penser, ils sont arrivés et voilà.

S - La Maison Tellier revendique son statut de "collectif". Le groupe a-t’il aujourd’hui atteint une formation fixe ou est-ce encore l’amour libre avec des intervenants de passage ?

RT - Pour le premier Ep, on était 3, on est passé à 5 avant d'enregistrer l'album. Maintenant, il y a une formation fixe (deux guitares-chant, une basse, une batterie et une trompette), et des intervenants de passage plus ou moins réguliers : la chanteuse Lippie, Maxime et David de The Elektrocution et... c'est à peu près tout...

S - Comment s’est passée la hausse d’effectif ?

RT - Notre écriture et la façon d'arranger les chansons ont changé. Par exemple, une chanson comme "Il n'est point de sot métier" était au départ très acoustique (elle faisait partie du répertoire "initial"), on la jouait juste à deux ( Helmut et moi). On l'a laissée tomber au moment du premier Ep, pour la reprendre plus tard, à 5... On a donc complètement changé l'arrangement, étoffé la structure, pour qu'elle devienne une véritable "création" du groupe.

Pour d'autres chansons, comme "A la petite semaine", tout était pensé au départ pour être joué en groupe, même s'il s'agit d'une "vieille" chanson. En fait, il n'y a pas vraiment de "règle". Chacun ramène ses nouvelles chansons, et on voit ce qu'on peut en faire : on a toujours une petite idée de ce que ça pourrait devenir, mais si le résultat final peut être parfois très éloigné de ce qu'on attendait au départ...

S - Jouer du country-folk dépouillé en 2006 ? Les Tellier sont-ils, comme beaucoup d’entre nous, des "vieux cons" de 30 ans ?

RT - Ouaip ! Enfin presque... Au début, le dépouillement était une sorte de dogme, imposé par notre formation (2 guitares, 2 voix). C'est vrai qu'on écoute beaucoup de musique acoustique, enregistrée avec 2 bouts de ficelle, du coup ça s'en ressent forcément sur certaines chansons. Mais maintenant, avec la formation complète, on a le choix...

S - Ces références à Robert Johnson, Neil Young, Dylan, le côté western… Ca fantasme sur Kerouac dans la Maison ?

RT - Ah bah ça, pour sûr !!! En même temps, j'ai découvert "On the road" seulement l'année dernière...

S - Justement, pour vous voir en concert, il vaut mieux arpenter les routes du nord-ouest, les autres sont plutôt délaissés...

RT - C'est normal, on débute à peine, on n'a encore jamais vraiment tourné, ça commence cette année dans le sud-ouest d'ailleurs... Pour le reste de la France, ça vient doucement, les salles commencent à nous contacter, et certains tourneurs parisiens aussi... Voilà, on croise les doigts pour la suite.

S - Pour se faire connaître, Internet est aujourd’hui un passage obligé. Vous avez un blog pour partager vos bonnes adresses musicales, des morceaux en écoute sur MySpace… Quel est l’impact réel du réseau pour un groupe comme la Maison Tellier ?

RT - Difficile à dire. Ca permet sans doute de toucher des gens qui ne peuvent pas nous voir en concert, ou qui n'achètent pas de disques... Maintenant, c'est sûr que c'est pratique et interactif, que ça nous permet de rentrer en contact avec des gens comme toi, d'avoir plein de "vitrines" médiatiques différentes, mais je pense que pour l'instant, on doit plus à Radio Nova (par exemple) qu'à Internet. La fréquentation de nos sites est "sympathique" (en gros, on ne travaille pas dans le vide...), mais pas extraordinaire.
Pour qu'une promo marche sur Internet, il faut qu'elle soit relayée par des médias (radio, presse, ...), par exemple, j'ai du mal à croire qu'un mec comme Kamini ne vienne de nulle part.

S - Parlons des textes : un tueur qui foire son contrat, un éconduit qui retrouve son ex dans une maison de passe… On a l’impression que vous appréciez les loosers, pas forcément magnifiques, mais plutôt touchants…

RT - C'est pas faux. C'est le genre de personnage à qui il peut arriver un peu n'importe quoi, et qui refuse sa condition. Le looser magnifique n'a pas le choix, perdre est sa raison de vivre, quand au winner...

S - La question de la langue est primordiale. L’album oscille entre les deux, mais les morceaux en français sont les plus accrocheurs : l’anglais reste-il vraiment incontournable ?

RT - Pour certaines chansons, c'est difficile de s'en passer. C'est l'éternel problème du français, qui n'est pas une langue très musicale. Dans un contexte folk (et donc anglophone), les mélodies sont parfois dures à adapter au français. Cela dit, c'est vrai que quand "ça marche" en français, le résultat est bien plus accrocheur qu'en anglais, et pour nous le travail est plus intéressant, parce que moins évident.

S - Miracle, aucun de vos textes n’est engagé (même pour la barbe). La condition pour ne pas devenir un "chanteur à chier" ?

RT - Ah ça... Comme dirait Brassens, "Mourir pour des idées"... Je trouve que la musique supporte mal l'engagement, surtout en français. Bon, certains y arrivent très bien… On joue quand même "Killing in the name", si ça c'est pas de la chanson engagée... Encore une fois, les textes engagés, ça marche plutôt bien en anglais parce qu'il y a un côté "slogan" dans l'anglais qu'on peut facilement adapter à une chanson, alors qu'en français...pfff. Enfin, si ça peut éveiller la conscience politique de certains d'écouter une chanson sur la pollution ou sur le ptit Nicolas de Neuilly, y'a rien à redire...

S - On parlait de "Killing…" : les reprises à la sauce Tellier des Rage ou de Britney Spears ont grandement contribué à vous faire connaître. A l’heure du zapping internet, pas peur de s’enfermer dans une image anecdotique et réductrice de groupe à reprises ?

RT - Bonne question, on n'avait pas envisagé les choses ainsi. Les reprises, c'était avant tout un truc pour faire rire les copains pendant les soirées (je pense notamment à celle de Rage, que je traîne depuis pas mal de temps dans ma guitare). Si en plus ça fait plaisir aux gens...
Maintenant, on ne cherche pas à tout prix à caser une reprise sur chaque disque, on n'en a pas tant que ça en réserve (bon, il en reste quand même une ou deux qui traînent).

S - Malgré la dominante acoustique du disque, on sent par moments que ça vous démange d’envoyer le bousin et de taper le punk… Aucun projet prévu avec vos potes d’Elektrocution, par exemple ?

RT - Ben si ! On a déjà enregistré une chanson avec eux, "Thank God i'm a country girl", disponible sur notre page MySpace. Une super bonne expérience, qui nous a donné envie de continuer à bosser ensemble. Mais pour l'instant, c'est classé secret défense...

S - Profitez de cette interview pour dilapider nos étrennes : conseillez-nous les disques que "merde, comment ça se fait que vous les avez pas encore ?"

RT - Ouhla... La question de nos rêves !!! Alors moi je dirais :

1. "Déjà vu" de Crosby, Stills, Nash & Young
2. "Forever changes" de Love
3. "The gilded palace of sin" et "Burrito deluxe" des Flying Burritos Bros
4. "The Band" de The Band
5. "The letting go" de Bonnie Prince Billy
6. Au rayon rareté, "Appalachian swing" des Kentucky Colonels
Je m'arrête, il y en a trop...

S - "Forever changes" en numéro 2 : on va vraiment finir par croire que vous les prenez, ces pilules du matin au soir !

RT - Haha... en fait l'ordre n'avait pas vraiment d'importance, mais je te signale qu'au rayon pilules, CSN&Y se défendent plutôt pas mal !!
J'avoue, j'écoute beaucoup de musique sixties à tendance psychédélique-babacool, j'aurais pu aussi mettre les Byrds, Buffalo Springfield, The Beatles, Jefferson Airplane, Les Kinks, ... mais pas de pilules à l'horizon en ce qui nous concerne, désolé... La légende rock'n'roll en prend un coup...

S - A ce propos, peut-on savoir d’où vient "Après dissipation", la plus embrumée de vos chansons ?

RT - C'est une chanson d'Helmut. A priori, une relecture un peu romancée de sa vie en colocation pendant sa jeunesse tumultueuse. En ce qui concerne la musique, c'est une tentative pour éviter que ça sonne comme du De Palmas, on voulait un peu une ambiance un peu Hippy-song.

S - C’est réussi ! Enfin, à l’ouest, quoi de nouveau pour l’année prochaine ?

RT - Un deuxième album pour avril, on espère !!

S - On attend ça de pied ferme ! Merci beaucoup les Tellier !