| | | par Emmanuel Durocher le 30/07/2006
| Morceaux qui Tuent Pensées massacre God : dog
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| Depuis une dizaine d'années, Ulan Bator traverse un peu comme un OVNI la scène musicale française ; insensible aux modes, le groupe se remodèle au fil des albums et c'est une formation franco-italienne menée par Amaury Cambuzat (un des deux membres fondateurs) qui continue ce parcours discret mais étonnant avec "Rodeo massacre".
Ce septième album, sombre voire apocalyptique, est un bel exemple de changement dans la continuité, on retrouve des morceaux composés de nombreux échantillons organiques et répétitifs qui rappellent les débuts du groupe mais aussi ceux de Tortoise mais il n'est plus question uniquement de post-rock, aussi sombre soit-il et l'évolution se fait vers une sorte de cold-wave avec des textes omniprésents qui cherchent la parité avec la musique en mélangeant les langues (français le plus souvent, anglais et un peu d'italien) et on pense à Marquis de Sade dans la voix, au Marquis de Sade (mais aussi à Bashung) dans les mots et c'est "sad" tout court dans l'ambiance ; avec des paroles cérébrales et morbides à la fois, on a l'impression qu'Ulan Bator cherche à "penser les plaies" sans vouloir les guérir, il n'y a qu'à regarder certains titres : "La femme cannibale", "Torture", "Pensées massacre"
"Rodeo massacre" a été enregistré sur les bords du lac Trasimène en Ombrie, témoin d'une bataille au cours de laquelle les romains furent massacrés par les armées carthaginoises d'Hannibal, à croire que les spectres des légionnaires ont fortement influencés les esprits des musiciens.
C'est de la musique que vient parfois la chaleur, dans des morceaux comme "God : dog" ou "Instinct" (dont l'intro ressemble énormément à une version trash du "Love will tear us apart" de Joy Division) les architectures sonores semblent bien apprivoisées mais les fondations s'écroulent à cause de déflagrations crasseuses et malsaines, on s'éloigne un peu des bidouillages post-rock pour se rapprocher d'une musique brute et violente avec des guitares qui s'alourdissent comme si les Young Gods en furie s'invitaient à une session de Mogwai, la bête est finalement beaucoup plus belle quand elle est sauvage.
On pourra reprocher au groupe la faiblesse d'un ou deux morceaux ou l'hermétisme de certains textes mais Ulan Bator ne cherche pas la facilité et veut explorer des nouveaux horizons, c'est tout à son honneur. |
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