Passé le vif intérêt causé par leur premier disque (éponyme, 1993), on n'a suivi la carrière des Tindersticks que de loin, tout en continuant à trouver de la classe au groupe et à son chanteur Stuart Staples. Malgré la distance prise, on a bien enregistré l'ouverture du son, plus chaud depuis "Simple pleasure" (1999) ; les changements importants de personnel (notamment le départ de Dickon Hinchcliffe en 2006, qui commençait à prendre trop de place au violon) ; et les deux échappées en solo de Staples. L'écoute de "Falling down a mountain" constitue une sorte de retrouvailles un peu plus approfondies - et pas décevantes.
Les Tindersticks ont évolué, et c'est à mettre à leur crédit. Les apparences sont trompeuses : "Falling down a mountain" comporte à peine des chansons. Seuls comptent le son, et la voix de Stuart Staples qui prend de plus en plus un air d'hidalgo blessé ("She rode me down") ou de bête assoupie. Très mâle. Derrière la beauté du son qui fait écran, on trouve des compositions brossées à grands traits, presque avec relâchement - comme faire des brouillons à l'encre de Chine ("Harmony aroud my table", la vaguement soul "Keep you beautiful"). Stuart Staples est un habitué des duos, depuis Carla Torgerson (The Walkabouts) sur "Travelling light" ("Tindersticks", 1995). Il remet aujourd'hui le couvert avec "Peanuts" accompagné de la rarissime canadienne Mary Margaret O'Hara ("Miss America", 1988, c'est aussi elle qui gémit sur "November spawned a monster" de Morrissey). En accord avec son titre, la chanson tient sur pas grand-chose, à peine deux accords et des arrangements de cuivres qui donnent une illusion de richesse : une dose désarmante d'humour et d'autodérision fait le reste. Le single "Black smoke" durcit un peu le ton avec un riff de guitare très Rolling Stones façon "(I can't get no) Satisfaction", et un saxo criard - non, ce n'est pas encore "Fun house" des Stooges, mais les Tindersticks semblent prendre désormais plus de "fun" tout court.