Bingo!

The Steve Miller Band

par Francois Branchon le 16/09/2010

Note: 8.5    
Morceaux qui Tuent
Sweet soul vibe
Hey yeah


"Bingo!" est le premier signe que donne Steve Miller depuis 1993, et on va le saluer, car si on se foutait bien de savoir ce qu'il pouvait devenir, perdu, englué dans son rock fm putassier et vain depuis des lustres, "Bingo!" est un retour, aux sources comme dans notre estime.

Petit rappel nécessaire, sur un musicien ultra-doué, mais souvent teinté d'opportunisme. Originaire de la Cote Est, nourri au blues, Miller sentit le vent souffler de Californie en 1966, se dépêcha de s'y ruer, d'y monter le Steve Miller Band et de partager les affiches des Fillmore et autres Winterland, au point de parfois passer pour un groupe du coin. Mais un groupe malgré tout hors des normes locales : si Miller chante et tient la guitare, les architectes du SMB se nomment au fil des huit albums de cette vie californienne Ben Sidran, Boz Scaggs (deux vieux potes d'enfance musiciens de jazz et de blues qui vont se régaler à se la jouer psychédéliques) et le producteur anglais Glyn Johns (alors en charge des Stones). Quatre de ces albums seront autant de réussites, "Children of the future" (1968), "Sailor" (69), "Brave new world" (69) et le chef d'œuvre "Recall the beginning, a journey from Eden", enregistré pendant l'éclipse de lune de janvier 1972 (un disque que Miller d'ailleurs déteste et dont il interdit la réédition Cd, son producteur Ben Sidran ayant fait réenregistrer ses parties de guitare acoustique jugées trop faibles par Jesse Ed Davies). L'année 1976 lui sera - à notre goût - fatale, tombant dans un rock de guitare à gimmicks, facile et creux mais hélas hyper-populaire, que Miller n'aura de cesse d'aller jouer dans des stades, pingouin en smoking rose bonbon.

"Bingo!" est donc un retour, au blues, le pur le vrai, via une sélection de reprises, d'Otis Rush, Jimmy Reed, Elmore James, Roosevelt Sykes, Lowell Fulson, BB King... Certes on aura du mal à les trouver meilleures que les originaux, mais on y retrouve cette voix, toujours aussi belle, un peu voilée, légère, la guitare qui à nouveau s'immisce en profondeur, vraiment, retrouvant des tonalités du passé, des ambiances aussi, feutrées et denses, et si parfois on frise l'imitation santanesque ("All your love" d'Otis Rush), on se régale de se téléporter à la fin des sixties, où "Hey yeah" et surtout "Sweet soul vibe" (tous deux de Jimmie Vaughan) auraient été - en légèrement moins produits peut-être - épatants au cœur de "Sailor" ou de "Brave new world"...