Morceaux qui Tuent Don't feel right Clock with no hands
Bien vieillir est une tâche ardue dans le hip-hop. Souvent, ses acteurs cherchent à devenir légitimes aux yeux d'une intelligentsia rock et polissent leur musique pour la rendre respectable. Les critiques généralistes raffolent de ces disques consensuels et empreints de maturité. Mais jouer les "artistes" réussit mal aux rappeurs, qui perdent leur mordant et leur originalité au profil d'influences mal réutilisées.
Après plus de quinze ans de carrière, on aurait pu croire que le phénomène allait toucher The Roots, qui s'éloignent progressivement du rap-jazz de leurs débuts pour développer une musique cosmopolite et accessible à un public large. En 2006, ils gagnent même un grammy award du meilleur disque rap pour leur septième album, "Game theory" : jamais le groupe n'avait été autant exposé au courant mainstream.
Pourtant, "Game theory" se révèle être une agréable surprise. Plutôt court, il mise sur une musique noireorganique et trépidante sans renier l'esprit hip-hop et les expérimentations audacieuses. Du rap-rock accrocheur du single "Don't feel right" ou de l'épopée finale "Can't stop this" au poignant et mélodique "Clock with no hands", il ne sombre jamais dans l'ennui et ne se perd pas en compositions prétentieuses. The Roots réussissent en fait à sortir un disque cohérent, et, osons le mot, adulte, tout en préservant la virtuosité et la créativité de leur musique, deux éléments manquant cruellement à bon nombre de rappeurs à la longévité tout aussi longue.