Le nom de ce jeune groupe parisien suggère qu’il est à la fois question de dérangement mental et d’aspiration à la transcendance. L’écoute de leur deuxième Lp "Private meaning first" le confirme : Arthur Dussaux et Martin Bejuy (guitares, chant), Paul Dussaux (claviers), Clément Caillierez (batterie) développent une sorte d’ascèse bruitiste, en cherchant à sculpter le son d’un chaos psychédélique.
Se repérer dans un brouillard électrique au son d’un lointain garage band, guidé par les pulsations d’un krautrock obsédant ("Isolation"), avec la pesanteur d’un rock stoner qui demande à chaque pas de s’arracher du sol : il faut de l’envie, de la fureur, et de la patience, pour s’extraire d’un tel bourbier.
"A coherent appearance" s’approche du bruit blanc avec des guitares triturées à la Sonic Youth. Les Psychotic Monks ne cherchent pas la facilité, et font durer l’expérimentation dans un geste presque masochiste.
"Unknow Pleasures" de Joy Division a beau avoir quarante ans, sa descendance se porte bien : on décèle des traces d’ADN du groupe anglais dans "Minor division" (une touche d’humilité ?). Les accords de guitares, qui progressent à tâtons dans les demi-tons graves, renvoient à des sentiments extrêmes de rage froide et de pur désespoir.
"Emotional disease" chasse sur les mêmes terres à la fois plombées et planantes que les américains stoner de Pontiak, et finit en hymne à la Radiohead période "OK computer". Les digressions, parfois longues, montrent une sensibilité en pleine construction et déjà à l’œuvre.
Enfin, une dernière prise d’élan de trois titres (dont un "Closure" quasi punk) : "A self claimed regress" semble très marqué par "A piper at the gates of dawn" (Pink Floyd, 1967) dont l’influence se prolonge sur le long envol final de "Evey sight", qui évoque un Syd Barrett aux semelles de plomb.
Eprouvante et oppressante, l'écoute de "Private meaning first" est aussi galvanisante et libératrice : une union des contraires que les Psychotic Monks réussissent avec audace.