| | | par Francois Branchon le 25/04/2000
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| Voilà un album qui impressionne, comme les premiers pas de U2 ou Echo & The Bunnymen impressionnèrent au début des années quatre-vingt, avec cette intuition d'un groupe important et dense, dont le plaisir de jouer son rock acoustico-psychédélique embrumé est palpable à chaque instant. Doves sont de Manchester, connus sous le nom de Sub Sub sur la scène de l'Hacienda (institution locale) et ont passé près de cinq ans à peaufiner ce premier album. Pendant plus de soixante minutes, "Lost souls", magnifiquement produit, semble les venger de près de sept ans de silence (trois comme Sub Sub, quatre comme Doves) en balayant le spectre de leurs vies en grand angle, avec ce chic (talent) de transformer la moindre anecdote anodine en apocalypse. L'album commence avec l'instrumental "Firesuite" (un morceau séduisant, rappelant Talk Talk, avec boucles de guitares et chants de baleines en écho). On remarque çà et là quelques repères du côté de chez Pink Floyd ("Lost souls"), mais la référence artistique pourrait être le petit chef d'uvre méconnu qu'était "Waterpistol" de Shack. A l'instar de Michael Head, Doves use en effet de la même corde sensible poétique, et au contraire d'un Love au psychédélisme aérien, ils la noient sous des strates d'effets, lui conférant un son impressionnant. La colonne vertébrale de l'album est la réunion des trois singles parus à ce jour : "Seasong" d'abord, qui arrive très vite avec ses six minutes de piano acoustique, lumière blanche et cloches, "Catch the sun" pourrait être l'exemple choisi par Doves pour dire à Oasis ou The Verve : "un beau morceau, c'est comme ça!". Mais la pièce de choix, le "pitch", c'est "The cedar room", huit minutes remarquables, accrocheuses, venimeuses, séduisantes, qui malmènent les enceintes avec des sons monumentaux aux textures riches et variées (du Hammond B3, de l'acoustique, de la Leslie, des murs de guitares...), un peu comme si Phil Spector s'était emparé de cette perle psychédélique qu'est "It's all too much" des Beatles. Si une trajectoire à la U2 se dessine pour Doves, on imagine alors sans peine "The cedar room" comme un nouvel hymne. Si 1999 a vu le rock à guitares plutôt sur les genoux, Doves lui assure la renaissance du nouveau millénaire. |
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