The Box Tops - Cry like a baby - Non stop - Dimensions

The Box Tops

par Francois Branchon le 10/03/2020

Note: 8.0    
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Juin 67 : un groupe américain inconnu, emmené par un chanteur de 16 ans emporte tout sur son passage avec "The letter", 1:54 de pêche pop soul irrésistible. Les Box Tops deviennent numéro un dans le monde entier. Pendant deux ans, le groupe sortira métronomiquement 45 tours et Lp, pour tenter de se maintenir à ces sommets, et brusquement s'arrêter. Exit The Box Tops.

Les coulisses de cette histoire sont moins idylliques. Au début 67 à Memphis, The Devilles et leur chanteur Alex Chilton sont un parmi les centaines de groupes américains qui ont poussé comme des champignons à la suite de la British invasion, fascinés de pop et de révolution musicale ("Pet sounds" est déjà sorti, "Sgt Pepper" arrive, comme Hendrix et le premier Doors).

Au début 67 à Memphis, le manager Chips Momans vient de quitter le label local Stax (où il s'occupait des stars-maison Carla Thomas et Mar-Keys) pour monter sa propre boite avec le producteur-arrangeur-compositeur Dan Penn (avec qui ils ont écrit "Do right woman, do right man" et "The dark end of the street", deux classiques pour Aretha Franklin et James Carr). Momans et Penn n'ont rien à faire de la pop en ébullition du moment, ni des Devilles, sauf de leur chanteur de 16 ans dont l'aisance et la maitrise de la voix laissent penser qu'il est bien plus vieux. Son potentiel les fascine, il lui faut un bon groupe de soul derrière lui.

Avec sur la table un contrat d'enregistrement et de distribution internationale (via le label new-yorkais Bell, sous-division de la Columbia), les Devilles signent et muent en Box Tops.

Ils deviennent ainsi un groupe maison, des marionnettes destinées à rapporter du cash. Produit aux studios American Recording de Memphis par Dan Penn, alimenté en chansons calibrées par le duo Dewey Oldham/Dan Penn ou par Wayne Carson Thompson, arrangé par Wayne Jackson (cuivres) et Mike Leech (cordes ), le groupe est factice en studio. En effet, seul Chilton chante vraiment, accompagné par des musiciens de studio ("The Memphis Boys" sur les crédits pochette) et pas des moindres : Eddie Hinton, Bobby Womack, Reggie Young - le sitar électrique sur "The letter" c'est lui...), et une fois les disques sur le marché, le groupe – au complet cette fois - s'épuise sur des tournées sur-bookées et à peine payées. Peu après la sortie de "Dimensions", le quatrième album (1969), Alex Chilton enverra tout balader et prendra les rennes de sa vie artistique, créant Big Star avec Chris Bell (après avoir refusé l'offre d'être le chanteur de Blood, Sweat & Tears, "trop commerciaux" dira-t-il – chat échaudé craint l'eau froide).

Musicalement cependant, Wayne Carson et Dan Penn avaient du talent dans une veine soul qui convenait parfaitement à la voix de Chilton, vraie référence de blue-eyed soul. Quatre albums (plus les singles issus) paraitront de 67 à 69. Des albums, à considérer plutôt comme des collections de morceaux, souvent des reprises soul ou blues, encadrant des chansons ciblées "tube", bien foutues, bien écrites et bien produites.

A la suite du coup de maître initial "The letter" (reprise en France par le chanteur des Lionceaux Herbert Leonard), les Box Tops proposeront notablement "Neon rainbow", "Choo-choo train", "I'm your puppet" ou "Cry like a baby", tout aussi puissant que "The letter". Curiosité, cette reprise en 68 de "You keep me hanging on" de Holland, Dozier et Holland, tube soul mondial en 66 par les Supremes, une version très progressive, qui sent à plein nez le plagiat de Vanilla Fudge (groupe de Mark Stein, Carmine Appice et Tim Bogert) qui en septembre 1967 se lançait avec des reprises pleine d'emphase capiteuse et psychédélique ("Ticket to ride", "She's not there", "Bang bang"...), dont une de 7 minutes de "You keep me hanging on".

"Dimensions" (1969) cependant, le dernier des quatre albums, voit le retrait de Dan Penn et même si le ton général du disque est toujours "cadré", Chilton, alors en pleine fascination Buffalo Springfield, gagne de la liberté, se laisse aller (une version très Morrisonnienne de 10 minutes de "Rock me baby" de B.B. King) et peut surtout proposer quelques compositions personnelles où les autres musiciens jouent enfin. L'opportunité d'entendre le méconnu et excellent guitariste Gary Talley sur le flamboyant "Together", de loin meilleur morceau de l'album. Un sacré baisser de rideau.

Le label anglais BGO documente ici avec un double album exhaustif (incluant des chutes de studio) la carrière jusqu'ici non rééditée d'un groupe aussi manipulé qu'attachant.




Box Tops désinvoltes, au moment de mimer ces morceaux qu'ils n'avaient pas joués...



THE BOX TOPS The letter (Us TV 1967)



THE BOX TOPS I'm your puppet (Audio seul 1967)



THE BOX TOPS Cry like a baby (Us Tv 1967)



THE BOX TOPS Soul deep (Us Tv 1968)



THE BOX TOPS Together (Audio seul 1969)