Avec le Royal Philarmonic Orchestra

The Beach Boys

par Jérôme Florio le 25/07/2018

Note: 1.0    

Dieu seul sait pourquoi… de l'aveu des Beach Boys eux-mêmes, c'est à leur management que l'on doit cette idée géniale pour presser le citron du fonds de catalogue des papys californiens jusqu'à la dernière goutte : "nettoyer" les bandes d'une sélection de chansons en n'en conservant que les voix, et substituer les arrangements originels par d'autres rejoués par le Royal Philarmonic Orchestra (RPO) – avec quelques fioritures supplémentaires, de manière à ce qu'il y ait un semblant de valeur ajoutée.

Dès l'inaugural "California girls", on retrouve des sensations bizarres, comme pendant la vogue des films noir et blanc "colorisés" et des duos posthumes (Aznavour / Piaf, Nathalie Cole / Nat King Cole…) dans les années 90 ; ou celle plus contemporaine des hologrammes qui font revivre les concerts d'Elvis ou de Claude François... soit un nouvel avatar tordu de la manie des versions "améliorées", un révisionnisme des souvenirs au profit d'un présent éternel et d'autant plus contrôlable.
Dans tous les titres issus de la période "Pet sounds", il manque au son RiPOliné du RPO ce côté massif des enregistrements originaux, conséquence collatérale des enregistrements en prise directe, qui saisit émotionnellement à la gorge autant que le mur de son de Phil Spector. L'amour que l'on peut porter aux compositions de Brian Wilson se reporte sur les exceptionnels musiciens de studio qui ont plus que contribué à leur création ; leur absence ici ampute les chansons de leur coeur. On croirait entendre des chansons pour génériques de fin de films de Walt Disney… Laissez-nous Carol Kaye ! Rendez-nous Hal Blaine !

L'enchaînement létal et contre-nature "In my room" (énième lifting raté) / "Kokomo" (une bouse reste une bouse, même avec une lunette de WC en or massif) a eu raison de nous, au bout de douze titres sur dix-sept. "The Beach boys with the RPO" n'a aucun intérêt, aucune raison d'être : tant qu'à faire, pourquoi ne pas effacer tous les décors de studio de "Chantons sous la pluie" (Stanley Donen, 1952) et les remplacer par des effets 3D numériques Imax, voire 4DX avec le siège de ciné qui t'asperge de flotte ? Ce disque dessine en creux un futur peu désirable pour la musique pop, qui serait upgradée de temps en temps - la musique classique, elle, survivra tant qu'elle sera interprétée. Quand cela adviendra, nous serons des androïdes rêvant de moutons électriques.



BEACH BOYS WITH ROYAL PHILARMONIC ORCHESTRA Fun, fun, fun (Clip 2018)


WRECKING CREW Making-of Good Vibrations (2008)