| | | par Sophie Chambon le 09/04/2007
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| Entre les textures affranchies du trio DAG et les envolées excitantes de Pentacle, quintette plus cuivré qui sabandonne aux "Triana moods" Sophia Domancich et Simon Goubert tentent pour la première fois un album en duo. Sur un répertoire largement original (ils composent et improvisent également à deux), voilà une autre tentation/ tentative, décidément réussie pour une oreille capable de goûter les nuances de leur musique. Cest que leur double univers, confondu ici sans excessive fusion est singulièrement excitant pour qui a commencé à sy aventurer.
Tout est ici soigneusement conçu et exécuté même si tout nest pas véritablement écrit. Et lalbum a une couleur originale vite reconnaissable, due à la personnalité de la pianiste Sophia Domancich. Elle sabandonne toujours aussi élégamment à ses propres rêves, entretenant la surprise par des changements abrupts de rythme, des interruptions, ou des reprises abondamment répétées. Une conception intimiste de la musique, une poétique du jazz portée à un rare degré, avec des sonorités plutôt sombres dessinées par le duo, sur un arrière plan de mélancolie, dépourvue de sensiblerie. Une émotion plutôt froide, une sensibilité qui affleure mais jamais ne déborde, sans évanescence. On ne sétonnera donc pas de les voir reprendre avec succès le "Lonely woman" dOrnette Coleman, devenu pour nombre de musiciens actuels, une sorte de passage obligé, mais aussi le beau thème de Mal Waldron "Seagulls from Kristiansund" : ils sancrent ainsi dans la lignée de ce pianiste de lépure, qui savait créer une véritable fascination par dabondantes répétitions tout à fait compulsives ("All alone").
Simon Goubert accompagne, soutient, habille parfois en fond sonore, comble les vides ou recrée, souligne les lignes de force de sa partenaire. Si leurs rôles sont assez finement répartis, on ne peut pas vraiment dire quil sagisse dune pianiste accompagnée dun batteur, il serait plus juste dévoquer des solistes construisant de pair leur interprétation. Simon Goubert pense aussi en termes mélodiques tout en sinscrivant dans la grande tradition des batteurs de jazz. Mais son jeu à la variété infinie (tout un festival sur caisse claire, grosse caisse, cymbales) sait saccommoder des discontinuités évidentes, recherchées par sa pianiste. Et de toute façon la mélodie ne fait pas loi. Ce qui lemporte au fond est infiniment plus subtil, une manière dêtre et de jouer ensemble, de poursuivre un dialogue engagé hors scène. Cest que ces deux là se connaissent parfaitement. Eux seuls peuvent nous dire "You dont know what love is". |
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