| | | par Francois Branchon le 13/08/2000
| Morceaux qui Tuent Burnt foot
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| On a souvent parlé ici de Peter Green, de son Fleetwood Mac, de ses origines (le blues anglais), de ses attractions éblouies vers le psychédélisme californien, de sa puissante et géniale sortie par le haut lorsqu'il fit prendre à son rock-blues une nouvelle voie, inventant une nouvelle pop explosant jouissivement les douze mesures du blues, l'album "Then play on" faisant figure de testament définitif en la matière. A la suite, Peter Green publia encore un single ("The green Manalishi") mais splittera son groupe peu après. Il poursuivra l'aventure lysergique une dernière fois, en solo avec cet album avant de se désintégrer en vol.
Par quel bout prendre "The end of the game" ?!
Quand Green décide de rejoindre les anges avec le blues sous ses ailes, et quand au même moment Jerry Garcia recherche le même blues depuis les délires célestes de son Grateful Dead (et le trouve, cf l'album "Europe 72"), il n'est pas étonnant que leurs musiques finissent par se croiser. Ainsi en va-t-il de "The end of the game". Peter Green (et quatre acolytes dont Nick Buck - futur pianiste de Hot Tuna - et Zoot Money) y entreprend une descente dans les entrailles du rock de San Francisco, où il croise à la fois Quicksilver, Steppenwolf, le Grateful Dead bien sûr et l'autre anglais fricotant avec les ricains, Eric Clapton (période buvard glissé entre les cordes de la Telecaster). L'album comprend six morceaux identifiés, mais le Cd apporte une dimension nouvelle, pour les soirs où la notion du temps devient floue : l'écoute continue et en repeat, sans avoir à retourner le vinyle, qui lui confère une impression de longue improvisation.
Si l'album est un "MT" global, il comporte tout de même ses ovnis.
"Burnt foot" est monstrueux : un rythme dément de basse (grandiose Alex Dmochowski connu auparavant comme bassiste de l'Aynsley Dunbar Retaliation) puis de batterie, puis enfin de cordes de guitare frottées (du genre à rendre fou le John Mayall de "Room to move") et enfin cette marée de supplications à la wah wah, sur un rythme à la Bo Diddley et John Lee Hooker (deux des guitaristes noirs qui fascinaient la scène de San Francisco), rythme lancé pour durer des heures. Aussi est-on si surpris de la chute, presque inattendue, comme si les musiciens tombaient de fatigue, mais l'enchaînement avec "Hidden depth" capte aussitôt l'attention, batifolage de guitare chargée en écho, reverb, distorsion et wah wah, sonorité à la Jerry Garcia (mais pourquoi donc ces deux-là ne se sont-ils jamais rencontrés ??), débouchant sur un entrelac de guitare/piano classique digne des hauteurs de "Dark star".
Du psychédélisme pur (peut-être le plus grand) transfusé de blues (comme l'avaient rêvé les Mayall, Clapton), chargé parfois de tripes dignes d'un Beefheart lorsqu'il veut bien rocker, et jamais suspendu aux arbres "pour faire joli" mais simplement parce que la maison semble soudain si petite qu'il faut bien exploser le toit pour s'échapper !...
Quant à "The end of the game", le morceau-titre qui clôt cette ahurissante ballade, sa première partie est un peu "égarée" mais sa deuxième, menée du début à la fin par un solo permanent à la wah wah, est un embarquement sans retour vers l'univers onirique de Peter Green. On comprend aisément que le pauvre n'en soit que difficilement revenu. Peu après en effet, Pierre Vert descendait du toboggan la tête la première, et il faut remercier le Dieu de passage de l'avoir préservé d'une destinée de légume à la Syd Barrett. |
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