On peut reprendre exactement cette chronique où l'on a quitté Mike Hadreas voici deux ans. La première chanson "Awol Marine" se place dans la stricte continuité de "Learning" (2010) : une fragilité vaporeuse, mélange très intime entre des claviers froids et une voix très (trop ?) proche.
Hadreas (se) construit quelque chose sous nos yeux - "Growing up in public", comme le disait Lou Reed à peu près à l'époque où Mike est né. Un acte de naissance artistique et un coming-out aussi gonflé que psychologiquement risqué. Quelques compositions semblent assez anciennes ("All waters", "Floating spit") mais contrairement à "Learning", enregistré dans la maison parentale, "Put your back n 2 it" bénéficie d'un vrai passage en studio négocié sans brusquerie par John Goodmanson (Los Campesinos, Sleater-Kinney...). Cela s'entend à quelques détails : une assise rythmique qui suit le piano plus qu'elle ne le supporte ("No tear"), des cordes sur "17". "Hood" serait même taillée pour un passage en radio si elle n'était pas aussi frustrante – elle s'arrête après avoir juste décollé, en moins de deux minutes. Sur cette chanson, on peut trouver que les arrangements, très volontaires, sonnent un peu "plaqués". Elle s'accompagne aussi d'un vidéoclip culotté, dans lequel l'imagerie gay s'accompagne d'un humour assez dérangeant.
Le côté "brouillon" de "Learning" avait ses avantages. On manque plusieurs fois de tomber dans le trop peu, l'insignifiance. Dans ses moments les plus maniérés, Mike Hadreas implore d'une voix étranglée à la Michael Stipe (REM) ou d'un Antony sobre (= supportable). Il faut entendre ce petit miracle, ce fil d'argent tendu au-dessus du vide : "Normal song" – Sufjan Stevens tout nu ou Low -, entre berceuse et prière inutile mais universelle, par-delà les sexes et les genres.