Morceaux qui Tuent Just like love Valley Every night Die 4 you
Bien que le quatrième disque de
Perfume Genius s'intitule "No shape", c'est pourtant à un
accomplissement formel que l'on assiste. Mike Hadreas a fait sa mue
devant nous, il est devenu un brillant metteur en scène de lui-même
(y compris à l'image) et de ses chansons, atteignant un point
d'équilibre parfait entre représentation et expression.
"I'm
here / How weird". On mesure le chemin parcouru depuis
"Learning" (2010), disque de survie douloureux et
bouleversant, jusqu'à l'affirmation de "Too bright" (2015)
et enfin l'éclosion sur ce "No shape", disque difficile à
synthétiser et pourtant d'une unité et d'une consistance
éblouissantes. Petit Prince à la vie abîmée, Hadreas et sa
garde rapprochée – le producteur Blake Mills (Alabama Shakes,
John Legend), son compagnon et musicien Alan Wyffels auquel une
chanson est directement adressée – enchaînent les prouesses de
production. Nudité drapée de claviers, bizarre funk /RnB désossé,
guitares sales, vaporeuses, infrabasses électro et à-plats de
cordes suaves ou tendues à se rompre : la liste des douceurs s'étire
trop longuement pour qu'on l'épuise en l'énumérant.
On
qualifierait volontiers certaines chansons de prières si le mot
n'était pas si connoté, en tout cas elles procurent un profond
réconfort de part et d'autre du micro. D'autres sont plus heurtées,
laissant entrevoir un côté autodestructeur. Bien que farouchement
intime, l'univers de Perfume Genius sait accueillir beaucoup de voix
(superbes harmonies, de Mike seul ou avec d'autres) dont celle agile
et distante de Natalie Mering (Weyes Blood) sur un titre.
"No
shape" est à la fois une célébration et une déclaration, qui
se vit dans l'urgence et s'écoute avec un poignant sentiment de
proximité, par-delà les expériences et les genres de tous ordres.