| | | par Sophie Chambon le 07/09/2001
| | |
| Au festival de Montreux dans les bonnes années, et nous sommes ici en 1971, pouvaient se produire des événements incroyables. Pour louverture de la soirée du label Flying Dutchman, un big band composite, un véritable 'all stars', était réuni pour une "Swiss suite" live de 26 minutes, qui dégage une jubilation et une électricité communicatives. Il y avait de lorage dans lair. Décidément cela valait le coup daller à Montreux à lépoque, on avait droit à "Smoke on the water", et comme il ny a pas de fumée sans feu, un bouquet de talents éclatait sur scène. Une puissance inconnue aujourdhui, savoureuse, avec lutilisation savamment orchestrée de trois saxophonistes aux fortes personnalités : Gato Barbieri, le fougueux et rauque argentin, qui sétrangle de bonheur - il était alors au faîte de sa gloire - à lalto Eddie "Cleanhead" Vinson et Oliver Nelson lui-même, dont on aura ainsi le plaisir de souligner le lyrisme. Car il nétait pas seulement un compositeur arrangeur dune grande finesse ("Black, brown and beautiful" et "The blues and the abstract truth"), mais aussi un soliste inspiré. Les anches senvolent à leur tour, les cuivres se déchaînent, soutenus par une section rythmique diabolique (Nana Vasconcelos, Pretty Purdie et Bosko Petrovic). Quand on sinterroge aujourdhui sur le jazz et son évolution, digéré dans le grand courant des musiques actuelles, on devrait réécouter ces musiques dun passé somme toute récent. Il semble que la question, alors, ne se posait pas dans les mêmes termes quaujourdhui. A la première écoute, on sait sur quel territoire on se place. Et le plus extraordinaire dans cet album, quand on le (re)découvre aujourdhui dans cette première réédition en Cd, réside en ce mélange unique, trop daté malheureusement, déléments traditionnels de big band, écrin très chic aux envolées lyriquement free, plus sauvages, carrément avant-gardistes des trois solistes. Ce parfum-là nest plus. Comme la mémoire dun passé et la promesse dun futur réunis et enfin réconciliés. |
|
|