| | | par Nicolas Bremaud le 28/02/2001
| | |
| A mi-chemin entre Steve Reich et disco, Man Jumping avait fait sensation en 1985 avec cet album à propos duquel Brian Eno lui-même avait déclaré qu'il s'agissait là du groupe le plus important dans le monde. Mais voilà, ces musiciens n'ont pas voulu choisir entre boite de nuit et salle de concert, et à force d'être assis entre deux chaises, ils ont fini par tomber : bonnes critiques, mauvaises ventes, fin de l'aventure. Seize ans après, on se dit que Man Jumping aurait peut-être eu plus de chance s'il avait fait une croix sur les discothèques. Les rythmiques pachydermiques et le son aseptisé typique des années 80 rendent "Aerotropics" et "In the jungle" (ainsi que leurs remixes) inécoutables en dépit des choses intéressantes qui s'y produisent à de rares moments. En revanche, "Walk on, bye", avec ses imbrications de motifs répétitifs de claviers, saxes et clarinettes, soutenues par le beau travail de percussions de Martin Dicham, est une réussite indéniable même si on y perçoit de façon peut-être trop évidente l'influence de Steve Reich. Cette influence étant clairement revendiquée, on ne peut s'empêcher de comparer. Un des grands intérêts de la musique de Steve Reich est qu'elle implique profondément les instrumentistes dans son déroulement, les obligeant à une concentration extrême sur le rythme et la gestuelle, qui fait d'eux des danseurs, et de chaque représentation une performance. Or, celle de Man Jumping est un produit du studio et n'est pas réellement jouée, ce qui ôte à mon avis une dimension essentielle à la fonction de répétition mise en avant par Steve Reich. Bien sur, Man Jumping n'avait peut-être pas pour but de copier servilement leur modèle, mais lorsqu'ils s'en ecartent, ils retombent dans ce qui n'est, en dépit d'une certaine sophistication dans la superposition des motifs et des sonorités, qu'une sorte de disco, certes dansable, mais pas écoutable. Donc, bien qu'il faille aussi mentionner à sa décharge, l'ingénieux "Sqeezy", faux zouk ludique et réjouissant, "Jumpcut" vaut plus par l'originalité de son projet que par le résultat obtenu. |
|
|