| | | par Sophie Chambon le 23/03/2001
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| Si on prétend connaître Sclavis, on se trouve confronté à ce qu'il affronte lui-même avec le courage de la nouveauté : tensions-détentes, répétitions-ruptures, hyperboles, changements radicaux de tonalités. C'est toujours Sclavis mais autrement : il semble se dessiner une problématique constante de l'affrontement depuis le début de son parcours, mais qui a pris un sens titré avec "Les violences de Rameau" et ce dernier album. Frottements entre des univers violemment étrangers, combats esthétiques élégants, sans vainqueur : là n'est pas l'enjeu. Plutôt une partie qui se joue sur l'échiquier mondial, la pièce d'un théâtre actuel; toujours impliqué dans la géographie de l'actualité (le retour de la suite africaine dans "Maputo"), la dénonciation de l'horreur avec le chant funèbre extraordinairement tendu de l' "Hommage à Lounès Matoub". Après ce très long morceau, 'le temps d'après' accorde un répit très provisoire avec le duo contrebasse-clarinette basse. On pourrait continuer à se poser des questions quant à la signification du titre, très littéraire qui interroge et crée un paradoxe avec la musique créée, moins littérale. Aux accents plus contemporains. L'originalité du quintet provient de l'arrivée de nouveaux compagnons de lutte : le violoncelliste Vincent Courtois étoffe le registre des graves avec une sensibilité à fleur de corde, alors que le trompettiste Jean Luc Capozzo, crée un contrepoint solaire à l'humeur plus chagrine des basses. La rythmique audacieuse est entraînée par les fidèles Bruno Chevillon et François Merville, toujours impeccables. Ces sonorités ajoutées dans les compositions provoquent encore d'autres face-à-face : d'entrée, dans le morceau titre, les deux souffleurs nous entraînent dans une transe joliment déréglée. A moins qu'ils ne s'épaulent dans une course poursuite, souvent haletante, comme dans "Possibles". Les énergies libérées se déploient dans toutes les directions. La musique généreusement expansionniste, parce qu'elle ne prend pas le pouvoir, se développe au contraire, à perte de louïe. Car la règle que Louis impose est la liberté d'expression pour tous les instruments. Qui repoussent leurs limites. Sa musique est une création de chaque instant, très travaillée, à la recherche d'un équilibre, souvent instable. Les prétendants, pluriels singuliers, s'entendent à continuer ce combat et oeuvrent de concert pour en retarder la fin. |
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