Année faste pour
les fans de Joni Mitchell ! En septembre dernier, Rhino publiait "The
Asylum albums", un coffret comprenant les versions remasterisées
des quatre albums que Mitchell a enregistrés pour le label Asylum
entre 1972 et 1975 ("For the roses (1972), "Court and
spark" (1974), "Miles of aisles" (1974), "The
hissing of summer lawns" (1975).
Et voici que le label au
cochon sort la troisième partie des archives de la dame, un autre
coffret (5 Cd ou 4 Lp) qui couvre ces mêmes années, mais qui, comme pour les deux premiers volumes,
fouille dans les malles pour rassembler démos inédites, prises
alternatives et divers enregistrements inédits de concerts. Autant dire, une
manne.
Les 96 chansons présentes ici donnent un aperçu
du processus créatif de Mitchell et permettent de mieux comprendre
la dynamique de son écriture. Au centre, sa voix, toujours exquise,
dont les tons cristallins sonnent si bien : ainsi cette suite pour
piano qui s'ouvre sur "Down to you", passe par "Court
and spark" et "Car on a hill" avant de revenir à
"Down to you". Un joyau de medley, où son arrangement de
piano, vibrant et transportant, résonne de manière éthérée,
créant une étude de jazz quasi atmosphérique.
Le matériel
rassemblé dans ce coffret met en évidence la capacité de Mitchell
à habiter ses chansons et à surtout créer de nouveaux
arrangements, éclairant d'un jour nouveau des chansons jusque là familières. Elle passe sans effort du folk au classique et
au jazz, et à bien des égards, on dira qu'elle est avant tout une chanteuse de
jazz ; son scat sur la première version alternative de "Twisted"
(sessions de "For the roses") démontre amplement son
habileté à faire ce qu'elle veut d'une chanson.
Son
caractère toujours enjoué apparaît également sur bon nombre de
morceaux. Lors d'une interprétation de "The circle game"
au Carnegie Hall (février 1972), elle annonce au public que la
chanson est faite pour être "bien chantée", et d'appeler sur scène
Crosby, Stills, Nash & Young, elle demande ensuite que la salle soit
rallumée pour voir le public, et tout le monde de chanter ensemble, Lors d'un
enregistrement de "For the roses", Joni et James Taylor de
se marrer et de partir dans un pot-pourri rock'n'roll "Bony
Moronie" / "Summertime blues" / "You never can
tell". Ou l'art d'être sur une grande scène mythique comme chez soi dans son salon.
Chaque morceau
de ces "Archives, Vol. 3" révèle la manière unique et magique qu'a Joni Mitchell de considérer une chanson. Écoutez cette version de "You turn me on, i'm a radio" avec Neil Young et ses Stray Gators (une session de "For
the roses" en 1972), où l'harmonica de Young se pose en contrepoint
parfait de la voix de Mitchell, puis écoutez ensuite cette même
chanson devenue complètement bluesy grâce au piano de Tom
Scott lors de la prestation de Mitchell en mars 1974 au Dorothy
Chandler Pavilion de Los Angeles. Avec la façon unique qu'a la voix planante
de Mitchell de faire écho à la guitare lors de l'outro. Ces
deux performances - mais il y en a beaucoup d'autres - révèlent à
elles seules l'étendue, la profondeur et la créativité incessante
de Joni Mitchell.
JONI MITCHELL Feat. NEIL YOUNG You turn me on i'm a radio (1972 "For the roses" LP session)
JONI MITCHELL Feat. TOM SCOTT The L.A. EXPRESS You turn me on, i'm a radio (Live at Dorothy Chandler Pavilion, Los Angeles 1974)