The art of fiction

Jeremy Warmsley

par Jérôme Florio le 24/04/2007

Note: 7.0    

Le franco (par sa mère)-britannique Jeremy Warmsley est de ces bâtisseurs pop qui ne peuvent pas s'empêcher de construire des ponts complexes sur de simples chansons : du haut de ses 24 ans, il nous rappelle le juvénile Divine Comedy de "Liberation" (Neil Hannon, 23 ans au compteur en 1993). C'est un peu de la même fraîcheur qui souffle ici.

On imagine les heures que Jeremy a passé derrière son écran à peaufiner ses chansons, au lieu de faire comme tant d'autres de son âge – courir les filles, glander au pub… C'est vers 16 ou 17 ans qu'il s'est mis à la musique, ce qui surprend à l'écoute de ces compositions très arrangées. C'est là que l'informatique, cette bouée de sauvetage des nerds, joue son rôle : alors que la démocratisation des outils de composition a généré sa propre facilité (la production électro, qui peine à se renouveler), Warmsley démontre que tout est question d'ambition. Moins bloqué sur les instruments classiques que Hannon ou Rufus Wainwright à leurs débuts, il incorpore largement l'électronique, s'amuse à triturer de simples beats pour les rendre moins évidents. La guitare rythmique de "I Promise" est proche du style de Johnny Marr des Smiths - d'ailleurs Morrissey était lui aussi un ado qui rêvait de la vie depuis sa chambre. Mais une fois sorti, c'est l'extraversion : "Dirty blue jeans" montre que Jeremy n'a pas peur de pousser la voix, qui devient tendue et nasale comme celle de Rufus Wainwright ("I knew that her face was a lie" au piano) en moins puissante et professionnelle – plutôt celle d'un charmant "boy next door" cultivé et romantique.

On préfère "The art of fiction" quand le côté pop et direct prend le dessus sur l'introspection électro qui tourne autour du pot (la deuxième moitié du disque) - on en manquerait de passer à côté d'un bon moment comme "Modern children". L'appétit de Jeremy Warmsley est grand, et il a la digestion facile : la suite, que l'on espère aussi enthousiaste mais plus resserrée, est déjà en gestation.