Après "A place where we could go" (2008), "Splash" confirme que Jeremy Jay a du style et de la tenue - l'exact opposé d'une attitude de poseur, qui n'en est que le pendant vulgaire. D'un geste à la fois grave et léger qui a la grâce inconsciente de la jeunesse, il déserte notre époque pour s'installer dans un son qui évoque la charnière 70-80. "Just dial my number" en est la représentante parfaite : une mignonne mélodie au piano, quasi naïve, acidifiée par une nappe de claviers aigres et rythmée par une batterie maigrichonne (on pense à Joy Division). C'est un régime sec, sur lequel Jeremy déroule des romances pop urbaines ("As you look over the city") avec un maniérisme vocal qui hésite entre froideur calculée (Colin Newman, Wire), préciosité (Brett Anderson, Suede) et les feulements du Morrissey homo-auto-érotique des tout débuts (les Smiths en 1983). Ses chansons ont une allure engourdie qui évoque des jeunes gens au look étudié dansant au ralenti, les filles affichant un sourire absent... En 1980, Lou Reed a publié un disque intitulé "Growing up in public" : Jeremy Jay est en pleine mue, sous nos yeux, et on danse lentement avec lui.
JEREMY JAY Just dial my number (Live TV Double Six Club, 2010)