Hornswoggle

Humcrush (Thomas Strønen & Ståle Storløkken)

par Hugo Catherine le 10/11/2006

Note: 8.0    

Deuxième collaboration en duo de Thomas Strønen et de Ståle Storløkken, "Hornswoggle" semble mettre en musique la matière exclusivement percussive de "Pohlitz", l'album solo de Thomas Strønen paru en début d'année. Autant "Pohlitz" avait pu nous paraître un peu plat, un peu nu, autant "Hornswoggle" est une réussite grâce notamment à la diversification du spectre des instruments et des sons mis à contribution, venant tuer dans l'œuf tout égarement purement percussif. Il serait exagéré de dire que l'album prend aux tripes mais il peut être brillant lorsqu'il se rapproche d'un jazz empli de micro-événements rythmiques plutôt que d'une bizarrerie électro un peu déjantée. Par moments, pour notre plus grand plaisir, "Humcrush" tient pleinement de l'ovni jazz, assumant l'allant du style et les tentations plus électroïdes. Reste que cet équilibre n'est maintenu que par intermittence.

A la manière d'Audun Kleive, Thomas Strønen utilise de petits ustensiles percussifs émettant des bruits discrets, de faible intensité, qui parviennent à former un ensemble cohérent, un style dont nous percevons la patte. On se prend même, de temps en temps, à esquisser des mouvements de menton en signe de reconnaissance d'un groove naissant. Certaines séquences sont à cet égard particulièrement réussies, comme les derniers moments de "Anamorphic images", excellents. La qualité des percussions est peut-être ce qui caractérise le mieux "Hornswoggle" tant la frappe de Thomas Strønen est agile, entraînante. Ses percussions sont d'ailleurs très mélodiques et contribuent ainsi à la construction d'une répartition inhabituelle du rythme et de la mélodie entre les instruments et les sons utilisés.

"Humcrush" est très bon lorsqu'il s'attaque aux tempos rapides, comme sur "Seersucker" ou sur "Grok" où le duo effectue une démonstration de précipitation maîtrisée. Si "Hornswoggle" ne nous transporte pas sur toute sa longueur, cet album mérite plus qu'un coup d'oreille. La dernière piste "Cyborg I" nous laisse d'ailleurs un bon écho en bouche : de grands cris sont lancés au beau milieu d'une étendue neigeuse ; évasive, la beauté de la piste s'apparente alors au charme de la banquise, pure, vide, à un désert blanc, en forme de sérénité terminale.