| | | par Sophie Chambon le 19/10/2012
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| Ce
dictionnaire publié au Castor Astral est captivant, que l’on
s’intéresse ou non au jazz, car tout le monde a entendu parler de
Miles, inventeur inclassable, vampire de tous les styles qu’il a
connus. Et avec cet incroyable ouvrage que l’on peut ouvrir à
n’importe quelle page, au gré de son humeur ou des hasards de
l’alphabet, on se fera une idée précise de l’homme et sa
musique. Lire ce Miles Davis, entre le A et le Z, est stimulant,
approcher une entreprise de cette envergure est jouissif même, car
on participe (un peu) à la formidable volonté de connaissance d’un
auteur qui traite Miles de la façon la plus objective qui soit, tout
en réussissant alabour
of love
envers ce maître du silence et de l’allusion. "Des
musiques qui marquèrent son enfance à celles qu’il écoutait à
la veille de sa mort, le 28 septembre 1991, Miles nous fait traverser
l’histoire du jazz en diagonale".
Miles
a rencontré beaucoup de succès mais aussi pas mal de déboires
avant d’être reconnu à sa juste place. A partir du moment où il
s’engage à traiter complètement l’œuvre d’un artiste,
l’auteur est tenu de s’intéresser à l’homme, d’évoquer sa
vie privée ( famille, amours, domiciles), ses traits de caractère,
ses centres d’intérêt (boxe, mode, automobiles...) mais il
s’emploie surtout à nous guider dans un voyage où la musique est
toujours présente, en recréant précisément les contours de la
galaxie où gravitèrent tant de musiciens exceptionnels, autour de
"l’ange noir", non de la désolation, mais du vertige, du
dépassement jusqu’aux lisières du jazz.
S’il
est terriblement difficile de maîtriser la totalité d’un sujet,
Franck Bergerot était de taille à se mesurer à cette icône. Il ne
montre jamais la volonté démiurgique de s’emparer de Miles une
fois pour toutes. Car la méthode employée interdit toute tricherie,
tout vagabondage ou digression nombriliste. Ce classement impartial
oblige à progresser d’une entrée à l’autre, en établissant
des connexion utiles au lecteur. Le principe du dictionnaire résulte
en un bilan, une somme impartiale d’où émerge un Miles
différent de son image publique, surmédiatisée. Évitant la
tentation anecdotique, Franck Bergerot se garde bien de verser dans
la bio "trash" ou "people". Il nous livre au
contraire des analyses musicales fouillées des albums et de la
musique du trompettiste, en musicologue expert, capable de relever
passionnément des heures d’écoute. Son exergue donne la clé du
livre, Bergerot entend, dans son travail, unir la recherche
exemplaire de certains "amateurs" sur l’histoire du jazz
(à laquelle appartient désormais Miles) et le goût de la
découverte, l’attirance pour le vif et la chair du jazz actuel.
Rédacteur
en chef de Jazz Magazine/Jazzman, Franck Bergerot, auteur de livres
aussi précieux pour comprendre cette musique que "L’épopée
du jazz" (Gallimard 1991 ) ou "Le jazz dans tous ses
états" (Larousse 2011), est l’une des plumes françaises
les plus pertinentes dans le petit monde du jazz. Auteur de "Miles
Davis, une introduction à l’écoute du jazz moderne" (Le
Seuil 1996), il a signé le catalogue de "We want Miles"
en 2010, l’excellente exposition de Vincent Bessières à la Cité
de la Musique et rédigé les notes de pochette de l’intégralité
des albums pour le coffret "The complete Columbia album
collection". Sans compter la performance de tenir en haleine
les auditeurs de France Musique une nuit entière consacrée au
trompettiste.
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