Notre cousine Pauline qui a la métaphore facilement champêtre nous parla ce soir-là de champs de blé désolés de chaleur, de tête dans une ruche abandonnée et de rivières à sec. Nous venions de passer une partie de l'après-midi dominical à écouter "Unrest", album d'Erik Honoré.
Le musicien norvégien - ancien collaborateur de Sidsel Andresen, Eivind
Aarset, Arve Henriksen et Brian Eno l'avait volontairement enregistré en état de tension nerveuse et fatigue intenses, pour, disait-il, "explorer la créativité ultime" à
travers "l'agitation, le conflit, la turbulence."
Pauline nous fit justement remarquer que la dite tension devait être toute norvégienne, car d'agitation, de fracas et de chaos aucune trace, mais un lent et morne filet sonore, un râle aride et abstrait, atmosphère étouffante de mort latente, de désolation post-atomique, ponctuée parfois d'échos industriels agonisants (le très beau "Procession") et conclu avec surprise par une "chanson" finale, plutôt belle également ("The park"). Nous décidâmes que nous réécouterions "Unrest" une nuit de pleine lune.
