| | | par Frédéric Joussemet le 16/10/2001
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| Pour les amateurs de Soft Machine, Elton Dean est le saxophoniste qui a apporté une approche free à cet immense groupe. Il a même eut le bon goût de quitter la formation juste avant qu'elle ne sombre et ne s'endorme (et nous avec) dans un jazz-rock glacé et inhumain. Le présent album est d'autant plus frustrant qu'il tombe parfois dans les mêmes travers, surtout dans le premier morceau et plus généralement dans la première partie du disque. En effet, aux côtés d'Elton Dean, si Fred T. Baker tient sa basse fretless de bout en bout, les cinq premiers morceaux voient officier un organiste et un batteur, et les trois derniers un guitariste (Mark Hewins) et un percussionniste (Mark Sanders), l'ensemble formant deux parties nettement distinctes. L'organiste Alex Maguire a déjà collaboré avec Dean. Il apporte deux compositions dont le morceau d'ouverture, robotique et impersonnel. Le second est un funk/jazz, qui a à peine la couleur de la musique black mais absolument pas la saveur. Elton Dean quant à lui signe les trois morceaux où est présent l'orgue Hammond. Ils délivrent un jazz actuel peu convaincant, dans la lignée des précédentes sorties du saxophoniste. Mais à l'inverse de son album "Silent knowledge" par exemple, il n'y a aucune prise de risque, et aucune sensation ne transparaît du jeu des musiciens. La seconde moitié est nettement plus convaincante. Deux morceaux sont cosignés par tous les intervenants, deux fois neuf minutes d'improvisation libre où chacun se complète et montre qu'il a des choses à dire. "Reel welders" débute paisiblement par un be-bop innocent, presque naïf. Il se dégrade, enfle en free, montant et entraînant. Une basse fuzz surgit, des percussions explosent et Elton Dean dans son élément crache des 'gimmick' rocailleux. Suit "Soldering on", une plage méditative. L'ambiance est tendue, le silence abrupt. Dean pousse une complainte à priori paisible et détachée. Basse et percussions montent, la guitare suit, et, sans s'en rendre compte, on est porté dans une tourmente décisive dont on ne décroche pas. L'album s'achève par un duo guitare/sax en hommage à Syd Barrett. La guitare se fait bruits, nappes spongieuses et frétillantes pour porter Elton Dean et ses bourrasques de notes. En jetant sans complexe le début de l'album pour ne conserver que les trois derniers morceaux, on jouit d'une musique enivrante, un jazz plein de ce qui fait sa force : une liberté entière et à vif qui émeut et transporte loin. |
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