| | | par Emmanuel Durocher le 31/03/2006
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| Les dispersions du groupe de Boston Clem Snide sont fécondes ces derniers temps : après une échappée un peu décevante (malgré des concerts enthousiasmants) de Jason Glasser avec Fruitkey en 2005, c'est au tour de leur chanteur-auteur-compositeur-guitariste de s'offrir une virée solo ou plutôt une nouvelle thérapie avec sa guitare comme seul compagnon.
La surprise est de taille, on a l'impression de connaître cette musique depuis toujours, enfouie dans un coin d'inconscient reculé, sans l'avoir jamais entendue car l'essentiel est là : des chansons terriblement mélodiques et incroyablement classiques à la fois. Malgré le minimalisme de "Bitter honey" qui peut surprendre voire dérouter, les dix titres de l'album partagent le riche héritage de Bob Dylan, Lee Hazlewood ou Nick Drake, certains pourraient le trouver lourd à porter mais le chanteur semble très bien l'assumer tout en gardant ses distances avec cette ascendance luxuriante.
Sa voix élimée, faite de profondeur et de modulations discrètes mais étonnantes, rappelle celle qui hantait le premier album des anglais I Am Kloot, c'est un concentré de la rudesse du monde et les arrangements de cordes, aussi épurés soient-ils, permettent d'habiller la mélancolie dans des vêtements simples mais tellement élégants. Les seuls ornements que se permet Barzelay sont des churs sur "Thanksgiving waves" (morceau entraînant et aérien qui fait penser à une sorte de shoegaze acoustique bigrement réussi) et l'effet sonore sur "Let us be naked" où la voix semble avoir été enregistrée avec un vieux micro à ruban à la mode des années 40. La nudité ne se retrouve pas que dans la musique, elle est aussi dans les textes : de l'exhibitionnisme de "Ballad of bitter honey" et "Let us be naked" à la mise à nu des sentiments sur "I wasn't really drunk" ou "Little red dot", le talent de songwriter se confirme sur ce disque servi par des mots doux et amers, désenchantés sans être désespérés, ironiques mais jamais cyniques.
La recette de "Bitter honey" tient à peu chose, à l'image de la sauce aigre-douce ou des bonbons acidulés, c'est un mélange atypique qui rassemble des éléments parfois antagonistes mais la saveur est unique, ce miel amer est une friandise dont on souhaiterait se délecter plus souvent. Dommage que l'emballage (la pochette franchement moche) soit si peu séduisant. |
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