Bruce Hornsby a deux fils jumeaux prénommés Russel et Keith, en hommage aux musiciens Leon Russel et Keith Jarrett : une équité parfaite, qui définit bien ce musicien versatile, pianiste confirmé qui puise aussi bien dans les traditions américaines folk, country, que dans le jazz ou le classique. Auteur du hit pop international "The way it is" en 1986, Hornsby a mené de front des collaborations en tant que musicien de studio, des projets en groupe, et s’est même retrouvé membre de Grateful Dead jusqu’à la mort de Jerry Garcia en 1995. Il est aussi collaborateur au long cours du réalisateur Spike Lee pour les musiques de ses films. Difficile de faire plus varié !
L’expérience des concerts avec le Dead a conduit Bruce à injecter des éléments d’improvisation dans sa musique, à en étirer les structures, tout en faisant des allers-retours avec des projets plus traditionnels (notamment de style bluegrass). On croise sur ses disques un panel choisi et varié de musiciens de tous bords : Jerry Garcia, Pat Metheny, Phil Collins, Charlie Haden, Bonnie Raitt, Branford Marsalis… jusqu’à aujourd’hui Justin Vernon (Bon Iver) et le batteur de jazz Jack DeJohnette sur ce récent "Absolute zero".
Bruce Hornsby fait partie des rares qui parviennent à réaliser une synthèse entre différentes chapelles musicales. On pense à Peter Gabriel (la voix) et Joe Henry pour ce soin apporté au son et à la production, qui présente un fondu atmosphérique, riche et précis. Un grain de folie dansant à la Talking Heads (la basse de "Stop making sense", des intonations à la David Byrne) emporte les cordes tourbillonnantes de "Voyager One". La recherche, les expérimentations et les arrangements comptent presque autant que les chansons.
"Absolute zero" est un disque qui a ses racines dans la musique populaire, dont il propose une mise à jour avant-gardiste : une complexité transcendée par un certain esprit d'équipe et le savoir-faire mélodique de Bruce Hornsby.