Bert Sommer avait une belle petite gueule et une voix flûtée, des atouts qui lui ont valu de tenir le rôle de Woof dans la création de la comédie musicale "Hair" en 1968. Autant à son aise en pattes d'eph qu'avec un col à jabot, il a composé seul ce disque de pop-folk baroque et enlevé.
Sommer n'a pas attendu la parenthèse chevelue de "Hair" pour exercer ses dons : il a brièvement fait partie du groupe The Left Banke en 1967, remplaçant son ami Mike Brown au chant sur le hit single "And suddenly"/"Ivy, Ivy", et co-écrivant "Pretty ballerina". C'est visiblement marqué par les arrangements de Brown, qui mélangeaient instruments rock et musique de chambre (cordes, clavecin…), que Bert Sommer a composé ses chansons : "She's gone" et "She's just a girl" raviront les amateurs du groupe new-yorkais. Bert Sommer a une plume bien à lui, et pas dans le derrière, si on considère les envolées très Broadway de "And when it's over" ou l'optimiste "Things are goin' my way". Seul à la guitare acoustique sur "Jennifer", plus un harmonica sur "The road to travel", il occupe l'espace sans faiblir avec son timbre de voix qui peut osciller de Robert Plant à Tim Buckley. Sommer se balade avec aisance dans les différents registres de la musique pop, flirtant avec l'americana et un middle-of-the-road bien orchestré ("A note that read"), marqué par les expériences lysergiques de son époque ("Brink of death"). "Hold the light" a une rythmique rock plus appuyée, tandis que "A simple man", plus proche de la soul-pop blanche, est moins réussie.
Décédé en 1990, Bert Sommer est aussi un grand oublié du festival Woodstock - il y a joué le 15 août 1969, et n'apparaît pas dans le film de Michael Wadleigh et Martin Scorsese. Alors que des tombereaux de louanges ont été tressés au Left Banke, il n'est que justice de reparler de lui, grâce à un bon disque.