Bachdenkel est un groupe ignoré en France comme ailleurs, même si parmi ceux qui ont fait leurs études sur les campus français des années soixante-dix, certains ont pu les entendre - ils ont par exemple joué deux fois à Grenoble en 1972 et 73 (et c'était très bien).
Qui sont ces Bachdenkel au nom étrange ? Contrairement à la sonorité et au contexte kraut de la période ils ne sont pas allemands mais de Birmingham. Petit groupe local psychédélique au début (U-No-Who), changement de line-up, changement de direction, rebaptisés The Bachdenkel Purists puis simplement Bachdenkel.
Ils s'installent en France en 1969 et louent le petit studio producteur Europa Sonor en juin 1970 avec l'intention d'enregistrer un album en une semaine. C'était sans compter sur leur perfectionnisme, leur procrastination, leur ambition artistique (un album à trois faces d'une heure, un titre en alphabet cyrillique !)...
Après des centaines d'heures de studio, Europa Sonor confisque lesbandes, les fout à la porte en leur intimant de trouver un label pour les racheter et publier l'album.
En 1972 Bachdenkel toujours bredouille auto-organise des concerts dans les circuits universitaires anglais et français et attire finalement les oreilles de la branche française de Philips. Le double album s'appelle "Lemmings" et sort sur le seul marché français en 1973, amputé de trois morceaux.
"Lemmings" est un bon disque, mais sa conception, ses sonorités, son style datent de 1970, et trois ans plus tard le monde du rock progressif a changé, Yes en est à "Tales from topographic oceans", Led Zeppelin à "Houses of the holy"... le grand public boudera.
Pourtant, ouvrir sa belle pochette noir et blanc (des chouettes remplaçant les champignons des Allman Brothers) le réécouter aujourd'hui est plaisant : les onze minutes de "Settlement song", le puissant "An appointment with the master" ou "Come all ye faceless" (neuf minutes) et son rythme de batterie martial qui rappelle étrangement celui de "Child in time" de Deep Purple (alors qu'il fut enregistré avant).
Il y a du matériel live ajoutée à cette réédition, les trois morceaux manquants du Lp Philips, leur second album ("Stalingrad" 1977) ainsi que les débuts du groupe en Angleterre (U-No-Who).