Morceaux qui Tuent Buried alive God hates us Fiction Save me
Nightmare. The Rev est mort mais la mort n'est qu'un rêve. The Rev, alias Jimmy Sullivan, était le fantasque batteur d'Avenged Sevenfold (A7X pour les initiés), décédé d'une overdose le 28 décembre 2009, peu avant l'enregistrement de ce cinquième album. Il avait vingt-huit ans. On imagine bien que son titre s'est imposé comme une évidence. Il semble conjurer le mauvais sort, nier la tragédie, tout ça ne peut être qu'un cauchemar. Demain au réveil tout ira mieux, qui sait ? Mais non, The Rev n'est plus là. C'est Mike Portnoy (Dream Theater) qui le remplace sur ce disque. C'est un bel hommage, c'était son batteur favori.
Avenged Sevenfold confirme ici son statut de groupe majeur de la scène metal moderne. Révélé au grand public par un troisième album quasi parfait ("City of evil", 2005) qui tournait délibérément le dos à la furie metalcore de ses débuts, le groupe poursuit dans la veine heavy metal mélodique qui fait son succès depuis cinq ans. La recette désormais éprouvée demeure identique à celle du précédent disque éponyme (2007) mais avec ce supplément d'âme et d'inspiration qui est la marque des œuvres abouties. Le groupe déboule sans crier gare avec trois titres catchy à souhait qui ne dérouteront pas les amateurs des deux albums précédents : on retrouve ces rythmiques puissantes et incisives, ces duels de guitares évoquant immanquablement l'Iron Maiden des grands jours et ce sens du refrain imparable et presque pop qui fera peut être encore grincer les dents des metalheads les plus intégristes mais qui a coup sûr réjouira une nouvelle fois l'immense majorité des fans. Pas de surprise mais un réel plaisir de retrouver le groupe au sommet de son art.
Mais c'est à partir du quatrième morceau, "Buried alive", que le disque prend une tournure réellement passionnante. Le ton se veut plus personnel, plus intimiste aussi parfois. On notera toujours ci et là l'influence évidente et revendiquée de Metallica ("Buried alive", "So far away"), de Pantera ("God hates us") et aussi, plus surprenante, de Pink Floyd ("Victim", "Tonight the world dies") mais A7X parvient à transcender ce pesant héritage pour imprimer à sa musique une touche personnelle et réellement novatrice. C'est sur les ballades, nombreuses sur ce "Nightmare", que le groupe révèle une profondeur et une maturité qu'on ne lui connaissait pas jusqu'alors. Un sommet est atteint lors du poignant "Fiction" sur lequel The Rev a posé sa voix si singulière, le morceau n'étant pas d'ailleurs sans évoquer l'univers onirique de Pinkly Smooth, le projet parallèle du regretté Sullivan. L'album se clôt sur une somptueuse pièce de dix minutes où les guitares se taillent une place de choix, se superposent, s'enchevêtrent, tissant une toile mortifère de laquelle l'auditeur, grisé par tant de maîtrise, ne peut plus s'échapper. "Tonight we all die young".